Le col­loque sur la res­pon­sa­bi­lité ci­vile : Ac­tua­li­tés du PFAS, de l'élec­tro­mo­bi­lité et de la géo­ther­mie

Event

Rythmé par des exposés passionnants sur les thématiques actuelles en responsabilité civile, le colloque a également été l’occasion pour les 80 participants d’échanger entre professionnels. Les cinq présentations ont porté sur des thèmes divers et variés comme les chances et les risques des PFAS, les changements induits par l’électromobilité pour les équipementiers automobiles, la responsabilité en lien avec les produits médicaux en Suisse et dans l'UE ainsi qu'un état des lieux de la géothermie.

Aussicht von Kursaal Bern

Rapport de la Commission technique Responsabilité civile

Lorenzo Natale, président de la Commission technique Responsabilité civile (CRC), a présenté à l’auditoire les activités réalisées par la CRC depuis le dernier colloque : le groupe de travail Conditions modèles a procédé à la révision des CGA (conditions générales d'assurance) de base non contraignantes relatives à la responsabilité civile d’entreprise. Elles ont été actualisées, notamment dans leur présentation, et comprennent désormais également quelques CGC (conditions générales complémentaires) non contraignantes.
De son côté, le groupe de travail Risques émergents (emerging risks) a enrichi la brochure portant sur les « Emerging Risks » d’un chapitre sur les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS).
Utilisés depuis des décennies dans l’industrie, ces produits chimiques sont difficilement biodégradables. En raison de leur longévité et de leur persistance, les PFAS sont détectables partout : dans le sang humain, dans le lait maternel et dans une grande partie de l'environnement, y compris l'eau, le sol et l'air. Ces dommages potentiels à l'environnement et à la santé ont déjà donné lieu à des procès en responsabilité civile, en particulier aux États-Unis. Pour Lorenzo Natale, les PFAS sont un sujet qui nous accompagnera encore longtemps. 

Lorenzo Natale am moderieren

PFAS dans la brochure "Emerging Risks" : Lorenzo Natale, président de la Commission technique Responsabilité civile, a informé les participants des activités de la commission.

Débat enflammé sur la mobilité électrique et les véhicules autonomes

Roland Friedli, manager Casualty risk engineering et responsable du groupe RC Engineering au sein de Swiss Re, a évoqué des faits fort intéressants dans son exposé intitulé « Équipementiers automobiles – Quo vadis ? ». Comme il l'a souligné, le marché de l'automobile électrique était en plein essor aux États-Unis en 1912. Les modèles électriques représentaient alors 40 pour cent des véhicules en circulation. Or, l'invention du démarreur électrique sur les voitures à combustion a mis un frein à cette expansion, et les véhicules électriques avaient presque disparu du marché jusqu’en 1990. Ces dernières années, les voitures électriques ont connu un nouvel essor. En Europe, leur part de marché devrait avoisiner les 25 pour cent en 2024.


Dans son intervention, Roland Friedli a notamment mentionné les derniers enseignements tirés en matière d'e-mobilité. Il a ainsi montré que les véhicules électriques font plus souvent l’objet de rappel de produits que les véhicules à combustion. Ce phénomène pourrait s’expliquer par les « erreurs de jeunesse » liées au développement de la technique de propulsion. Ce sont surtout les coûts de réparation des véhicules électriques, bien plus élevés que ceux des véhicules à combustion, qui interpellent les assureurs. Roland Friedli a également abordé la question de savoir si les véhicules électriques s’enflamment plus souvent que les modèles à combustion. Comme il l'a expliqué, c'est le contraire qui se vérifie, mais les incendies sont potentiellement plus graves dans le cas des véhicules électriques. Outre l'électromobilité, Roland Friedli a également abordé le sujet des véhicules autonomes et des implications possibles en matière de responsabilité civile.

Roland Friedli am moderieren

Les véhicules électriques font plus souvent l’objet de rappel : Roland Friedli, manager Casualty risk engineering et responsable du groupe RC Engineering au sein de Swiss Re, a parlé des voitures électriques et de la mobilité autonome.

Le moment disruptif de l'IA

En rebondissant sur la mobilité autonome, Ioannis Martinis, head of Innovation & LegalTech auprès de Coop Protection Juridique SA, a soulevé la question de l'intelligence artificielle. Et d’expliquer dès le début de sa présentation intitulée « Droit ex machina » que le monde est actuellement témoin d'un moment iPhone, c'est-à-dire d'un changement disruptif. L'intelligence artificielle prend effectivement une place de plus en plus importante dans notre vie quotidienne. 

Néanmoins, elle a aussi ses limites, comme en témoignent les exemples avancés par Ioannis Martinis. Il a notamment évoqué des cas où des avocats avaient eu recours à ChatGPT pour identifier de la jurisprudence et qu'ils avaient cité ces décisions dans la plainte déposée devant le tribunal. Or, les résultats des recherches générés par l'IA se sont révélés être de pures inventions. L'intelligence artificielle n'est pas entraînée pour fournir des contenus authentiques et exacts. Il s'agit souvent de « faux contenus, très joliment emballés », commente Ioannis Martinis. Bien que l'IA offre un grand potentiel pour prendre en charge certaines tâches et améliorer ainsi l’efficacité de nombre de processus, il ne faut pas oublier que la machine n'a pas de conscience. Au cours de son intervention, Ioannis Martinis a souligné qu'il est essentiel d'investir dans l'« IA Empowerment », c’est-à-dire dans l’IA comme outil d’émancipation afin que tous, nous soyons en mesure de l’utiliser sans en méconnaître les limites ni les dangers. 

Ioannis Martinis am moderieren

Le monde est actuellement témoin d'un moment iPhone : Ioannis Martinis, head of Innovation & LegalTech auprès de Coop Protection Juridique SA, a souligné l'importance d'investir dans l'« IA Empowerment ».

Responsabilité en lien avec les produits médicaux – Période de glaciation des relations entre l'UE et la Suisse

Le retour du monde virtuel à la réalité fut rapide pour l’auditoire avec l’exposé d’Ina Ebert consacré au nouveau contexte dans lequel évolue aujourd’hui la responsabilité civile en lien avec les produits médicaux. Cette responsable du droit des assurances et de la responsabilité civile auprès de Munich Re s’est attachée à souligner les répercussions de l’abandon de l'accord-cadre qui aurait dû régir les relations entre l'UE et la Suisse. Pour faire court, la Suisse est désormais considérée comme un pays tiers en vertu du nouveau droit. Ainsi, les fabricants suisses de produits médicaux notamment qui souhaitent les distribuer sur le marché de l'UE doivent désigner un mandataire dans l'UE, impliquer des importateurs et attendre l’obtention d’une certification par une autorité de l'UE. Et vice versa. Il faut savoir que la Suisse exporte 46 pour cent environ de ses produits médicaux vers l'UE et en importe environ 54 pour cent depuis l'UE. Pour les assureurs en responsabilité civile, ces nouvelles barrières sont loin d’être négligeables, car elles se traduisent par une complexité et une insécurité juridique accrues. En outre, le risque de dommages supplémentaires augmente également puisqu’il devient plus compliqué de surveiller le marché. Les problèmes graves en rapport avec un produit médical ne devront plus être annoncés que là où ils se produisent, c'est-à-dire soit dans l'UE, soit en Suisse.

Ina Ebert am moderieren

La Suisse comme un pays tiers : Ina Ebert, responsable du droit des assurances et de la responsabilité civile auprès de Munich Re, a parlé du nouveau contexte dans lequel évolue aujourd’hui la responsabilité civile en lien avec les produits médicaux.

Géothermie suisse – État des lieux

En 2019, le Conseil fédéral a décidé que la Suisse devrait atteindre la neutralité climatique d'ici 2050. La recherche de sources d'énergie renouvelables gagne donc de plus en plus en importance. Ressource énergétique renouvelable, l'énergie géothermique présente un grand potentiel, car elle est considérée comme une source d'énergie fiable et stable. Dans leur exposé, David Henzi, responsable Risk Engineering chez Allianz Suisse, et Pierre Hüppi, responsable Underwriting responsabilité civile à la Vaudoise, ont abordé la question de la géothermie dite profonde (plus de 3000 m de profondeur) et en ont présenté deux méthodes de production différentes. Ils ont également énuméré les risques encourus et précisé la mesure dans laquelle le secteur de l’assurance est impliqué dans leur couverture. 

Davind Henzi und Pierre Hüppi am moderieren

Une obligation d’assurance en responsabilité civile, telle qu’elle a été introduite par certains cantons, ne saurait être la panacée : Pierre Hüppi, responsable Underwriting responsabilité civile à la Vaudoise, et David Henzi, responsable Risk Engineering chez Allianz Suisse (de gauche à droite) ont évoqué les solutions d'assurance possibles dans le domaine de la géothermie.

Risque économique par excellence, le risque d’exploitabilité désigne l'obtention d'un débit d’extraction insuffisant lors de l'exploitation d'un réservoir géothermique. Il faut des acteurs pour garantir un tel risque, sachant que les assurances ne couvrent généralement pas les risques classiques auxquels sont exposées les entreprises. Bien que la question de la solution d'assurance soit encore en suspens, David Henzi et Pierre Hüppi soulignent qu'une obligation d’assurance en responsabilité civile, telle qu’elle a été introduite par certains cantons, ne saurait être la panacée. La table ronde organisée par l'Office fédéral de l'énergie a démontré l’extrême importance d'un dialogue sur les risques et d’un échange correspondant entre l’ensemble des acteurs impliqués. Ils permettent une compréhension et une confiance mutuelles, ce qui est essentiel pour soutenir la géothermie. 

Les différents exposés, tous plus instructifs les uns que les autres, ont suscité un immense intérêt dans le public. Le grand nombre de questions posées par les personnes présentes en témoigne également. Un quiz a permis aux participants de tester les connaissances acquises et de remporter de nombreux prix. Le repas de midi sur la terrasse ensoleillée du Kursaal Bern, avec la vue dégagée sur la vieille ville de Berne, a également été particulièrement apprécié.

Kommission Haftpflicht

La Commission technique Responsabilité civile de l'ASA sur la terrasse du Kursaal de Berne.

 

Les Présentations (en allemand)